Pour citer cette page : Roelants, D. (2025). Langage symbolique en chimie. DidacSciences. https://didacsciences.be/.
Introduction et balises
Les apprentissages en chimie se rangent selon trois niveaux de savoirs nécessitant des liens de la part des élèves afin qu’ils puissent comprendre les concepts de base en chimie. Chaque niveau, présentant un champ de validité limité, est défini comme suit:
- macroscopique ou phénoménologique : lié à l’expérimentation, à ce qui est perceptible. Il fait appel par exemple aux concepts de substance, d’espèce chimique, de corps simple/composé, de masse molaire, de réaction chimique ;
- microscopique ou moléculaire : non visible et ayant recours aux modèles iconiques (ex : modèles 3D des molécules, dessins ou animations)
- de l’écriture symbolique : lié aux concepts d’atome, de molécule, de masses atomiques, etc. Il mobilise un langage chimique et mathématique propre (ex : symboles atomiques et équation de réaction).
Le schéma de Mzoughi-Khadhraoui et Dumon (2012) ci-après permet de montrer les liens entre ces différents niveaux de savoirs. En chimie, il y a ainsi des allers-retours fréquents entre le monde perceptible, observable (expérimental) et le monde théorique, invisible (construit). Ce passage d’un monde à un autre est caractérisé par nombre de conventions symboliques utilisées tout le long de la scolarité. Ce langage symbolique s’est développé en même temps que la chimie en tant que science et sa maîtrise constitue aujourd’hui un outil essentiel pour la réussite des apprentissages en chimie à l’école (Canac, 2017[1]; Taskin & Bernholt, 2012[2]).

Prenons l’exemple de l’équation-bilan : ce concept permet de rendre compte, de façon visuelle, de l’observation expérimentale macroscopique. Elle donne d’abord accès à un bilan en termes d’éléments qui amène ensuite à un bilan en masse grâce au recours à la quantité de matière (au nombre de moles). Elle permet aussi l’accès à un bilan en volume appuyée sur la loi d’Avogadro-Ampère. Le concept d’équation-bilan nécessite donc une abstraction élevée de la part des apprenants et amène des difficultés de symbolique et de langage.
Le passage au monde théorique des modèles amène ainsi des difficultés pour les élèves relatées par de nombreux auteurs (Barlet et Plouin, 1994; Taskin et Bernholt[3], 2012). Dehon et Snauwaert (2011) soulignent, par exemple, la difficulté qu’ont les élèves à comprendre les codes de l’équation de la réaction chimique. D’autres recherches comme celle de recherche de Taskin et Bernholt (2012[4]), en langue anglaise, analysent et catégorisent de manière intéressante les difficultés des élèves lorsqu’ils manipulent les formules chimiques (problèmes liés au langage, des problèmes dus à la compréhension conceptuelle, et des problèmes dus à une sélection et une interprétation inadéquates des formules). Vous trouverez ces articles ainsi que d’autres sur le sujet dans la partie “Écrits scientifiques”.
Ainsi, modéliser est un exercice qui permet de passer du champ des objets perceptibles et empirique au monde des théories et modèles (concepts, lois, etc). La mise en relation du registre symbolique avec celui des objets pose beaucoup de difficultés pour les élèves car il nécessite la mobilisation des conventions ainsi que du langage propre à la chimie.
Le langage symbolique étant considéré comme une forme de modélisation, vous trouverez d’autres ressources intéressantes sur la page Modèles et modélisations.
Entrées faciles
Le site “Culture Sciences-Chimie” propose de nombreuses ressources pour l’enseignement de la chimie. Deux articles sont consacrés au registre symbolique de la chimie. Le premier traite des spécificités de ce langage et de son élaboration historique, le second de l’apprentissage de ce langage.
L’article de Dehon et Snauwaert paru dans la revue Chimie nouvelle (numéro 129, 2018) explore la question de l’élaboration de la symbolique chimique et de son lien avec les concepts construits par les chimistes au cours de l’histoire.
L’ouvrage de Dagognet (2002)[5] explore le langage de la chimie, notamment la nomenclature chimique.
Écrits scientifiques
L’article de Canac (2022) présente une analyse historique des raisons ayant permis l’élaboration des formules chimiques par les chimistes du 19e siècle en vue de formuler des pistes pour l’apprentissage des formules chimiques dans le secondaire (collège, France). Cet article s’ancre dans un cadre de problématisation articulant registre des modèles et sémiotique.
Dehon et Snauwaert (2018) proposent un article intéressant à propos de l’analogie entre l’alphabet de la langue française et la chimie. Ils soulignent les spécificités de la langue symbolique des chimistes et proposent des pistes didactiques pour la pratique de classe.
La thèse de Canac (2017) s’appuie sur l’hypothèse que le langage symbolique mobilisé en chimie n’est pas suffisamment intégré aux apprentissages. Dans un premier temps, la recherche identifie les difficultés des élèves dans l’apprentissage du langage symbolique ainsi que les méthodes d’enseignement utilisées. Ensuite, en s’appuyant sur l’histoire des sciences, elle propose une analyse d’un dispositif mis en œuvre pour articuler les registres des représentations, empirique et des modèles.
La communication de Dehon et Snauwaert (2016) pour les 9e Rencontres de l’ARDiST (2016) propose une nouvelle taxonomie des systèmes sémiotiques se basant sur des concepts issus du champ de la linguistique, de la terminologie et de la sémiologie. L’article est enrichi par l’analyse d’un programme de cours de chimie et de manuels scolaires afin de dégager des tendances.
Dehon et Snauwaert (2015) explorent les difficultés des élèves à composer avec les multiples informations présentes dans l’équation de réaction chez des élèves de 16-17 ans. (secondaire, Belgique) et notamment celles qui sont liées aux symboles employés.
L’étude de Mzoughi-Khadhraoui et Dumon (2012) vise à mettre en évidence comment les élèves s’approprient le langage de représentation de la réaction chimique et plus particulièrement elle cherche à évaluer leur capacité à donner du sens aux représentations littérales et symboliques de la réaction chimique en secondaire (première année de lycée, Tunisie).
L’article de Dehon et Snauwaert (2011) met en évidence les difficultés des élèves de secondaire (3e, Belgique) dans la compréhension des conventions symboliques de l’équation de réaction. Les auteurs proposent ensuite d’analyser les effets d’un outil didactique basé sur des modèles moléculaires sur l’apprentissage de l’équation de réaction.
Edeline (2009) propose un article intéressant qui retrace l’évolution des signes employés en chimie, en passant des symboles alchimiques à un système moderne hybride mêlant convention et iconisme.
L’article de Brehelin et Guedj (2007) analyse l’évolution dans les programmes des principaux concepts, modèles et symboles de chimie pour le secondaire (collège, France) et une séquence de classe s’appuyant sur l’histoire des sciences pour aborder les divers concepts afin d’amener un questionnement chez les élèves.
Les propos de Barlet et Plouin (1994) détaillent les multiples facettes du concept d’équation-bilan et les difficultés qui en découlent, notamment en ce qui concerne la symbolique et le langage. Les liens avec l’histoire des sciences permet de prendre conscience de ces difficultés et de leur persistance. Des propositions didactiques viennent ponctuer le propos.
Carretto et Viovy (1994) questionnent l’apprentissage du concept de réaction chimique et met notamment en évidence les difficultés des élèves face à ce concept, y compris le langage symbolique associé.
Pistes de réflexion pour les TFE et mémoires
S’intéresser au langage symbolique de la chimie dans les apprentissages scolaires, c’est par exemple :
- interroger le sens que les élèves donnent aux représentations symboliques ;
- se questionner sur les démarches propices à améliorer la compréhension des élèves de ce type de langage ;
- investiguer la place de l’histoire de la chimie dans la constitution de dispositifs favorisant l’appropriation des représentations ;
- établir un forme d’état des lieux des apprentissages ciblés sur ce langage en particulier ;
- se pencher la place qu’occupe ce langage dans les apprentissages de concepts de chimie tout au long de la scolarité des élèves ;
- etc.
[1] Canac, S. (2017). Le langage symbolique de la chimie en tant que méta-niveau entre registre empirique et registre des modèles: une problématique de l’enseignement-apprentissage de chimie. Doctoral dissertation, Université Sorbonne Paris Cité.
[2] Taskin, V. & Bernholt, S. (2014). Students’ Understanding of Chemical Formulae: A review of empirical research. International Journal of Science Education, 36(1), 157-185.
[3] Taskin, V., & Bernholt, S. (2014). Students’ Understanding of Chemical Formulae: A review of empirical research. International Journal of Science Education, 36(1), 157-185.
[4] Taskin, V., & Bernholt, S. (2014). Students’ Understanding of Chemical Formulae: A review of empirical research. International Journal of Science Education, 36(1), 157-185.
[5] Dagognet, F. (2002). Tableaux et langages de la chimie : Essai sur la représentation des corps. Champ vallon.
