Introduction et balises
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La Terre a connu des bouleversements considérables dans son histoire dus à de nombreux facteurs internes et externes de notre planète (variation de l’énergie solaire incidente, tectonique des plaques et dérive des continents, modifications de la composition de la biosphère, etc). Aujourd’hui, la Terre est marquée par les interactions humains-écosystèmes. Depuis l’ère de l’Anthropocène, l’humain a puisé dans son environnement toute une série de ressources pour son alimentation, son habitat, son activité. Les progrès scientifiques et l’explosion de la démographie ont accéléré ce processus aboutissant à des modifications majeures qui nuisent aux écosystèmes, à leur biodiversité et à leur équilibre fragile. L’humain a aujourd’hui de nombreux défis à relever pour limiter ces perturbations.
En lien ces préoccupations, l’éducation à l’environnement, à la biodiversité et au développement durable a été introduite à l’école. Selon le rapport de Brudtland “Notre avenir à tous” de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’ONU en 1987, le développement durable est défini comme « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». L’objectif est de fournir aux élèves, futurs citoyens, des bases de connaissances mais aussi des outils de réflexion qui leur permettront de relever les enjeux tels que la réduction de l’empreinte écologique ou encore la préservation de la biodiversité. En amenant ainsi les élèves à comprendre l’importance de préserver l’environnement dans lequel ils vivent, ils peuvent alors s’emparer de ces problématiques.
Au lieu d’être purement descriptive, l’éducation au développement durable permet d’amener un débat en classe afin d’amener une dimension réflexive à cette éducation, impliquant une réflexion sur différents registres (scientifique certes, mais également économique, éthique, sociale, etc.). Ainsi, Fabre (2016)[1] dit : « Dans une perspective de démocratie participative, le rôle du nouvel expert est d’aider les citoyens à construire les problèmes et à trouver eux-mêmes la solution ou les différentes solutions ». Ceci dit, toutes les positions pouvant être prises ne se valent pas nécessairement. Certes, chaque solution est un arbitrage entre différentes dimensions du problème dont certaines ne sont pas strictement scientifiques. Cependant, le développement durable est un concept hybride, politico-scientifique de l’Occident au XXè siècle (Fabre, 2016) qui s’intéresse aux conditions de durabilité de l’entreprise humaine, sa viabilité économique, les possibilités technologiques et l’acceptabilité sociale de ses décisions. Il faut à cela considérer trois conditions de possibilités de l’émergence et de la fonctionnalité de ce concept :
- éthique, lorsque sont considérées les responsabilités de chacun vis-à-vis de la nature, des autres, des générations à venir, etc;
- épistémologique, en renouvelant notre rapport au monde, au temps, à la nature ; en articulant des échelles locales et globales ; en étudiant les interdépendances entre parties constituantes de la complexité du monde comme hybridation des natures et des cultures;
- politique, avec les changements de gestion politique et sociale des problèmes et la contestation de l’expertise classique pour une démocratie plus participative.
Concernant le changement climatique, il s’agit d’abord de donner aux élèves la possibilité de construire un modèle, celui devant par ailleurs conduire à dépasser les descriptions séquentielles et linéaires pour envisager le caractère dynamique et écosystémique de ce phénomène. Plus précisément, il s’agirait de s’intéresser aux flux entrants et sortants entre compartiments qui hébergent, par exemple, le carbone selon des temporalités et des processus variés.
Dans ce cadre, on ne considère pas aujourd’hui l’action de l’humain comme un réchauffement directement de l’atmosphère terrestre mais plutôt comme un déplacement de son équilibre thermique, entre autres.
D’autres enjeux didactiques peuvent être soulignés, comme le dépassement de l’obstacle de l’harmonie, le dépassement d’une Nature fixée ou encore la conception selon laquelle l’écosystème tient sa pérennité de sa richesse en espèces.
Certains auteurs s’interrogent sur la possible perte d’identité et de spécificité des contenus disciplinaires au profit de l’interdisciplinarité poussée par ces “éducations à…”. Vous trouverez divers articles à ce sujet ci-dessous comme celui de Orange-Ravachol (2014) ou de Lange (2014).
Enfin, en lien avec cette thématique, les lecteurs pourraient également être intéressés par notre page sur l’École du dehors.
Entrées faciles
Le “guide pédagogique pour une éducation relative à l’environnement (ErE)”[2] est un outil qui accompagne les livrets élèves de la même collection. Une introduction passe en revue les concepts liés à ErE, les objectifs, les balises historiques puis chaque activité est accompagnée d’un recul méthodologique.
Sur l’Éducation relative à l’Environnement (ErE), le magazine Symbioses offre à ce jour 137 numéros riches d’articles accessibles dont des pistes didactiques prometteuses.
Le Webinaire “Une épistémologie des « Education à… » ?” par Hertig (2022) est dédié aux enjeux de la formation des enseignants aux “éducations à/aux”, avec l’exemple ici de l’éducation à la durabilité : Lien YouTube.
L’ouvrage “Les cahiers du développement durable”[3] se propose comme un outil d’accompagnement offrant des pistes pour intégrer le développement durable dans les classes dans une approche transversale et décloisonnée. Après une présentation des enjeux du développement durable, les auteurs proposent des pratiques à mettre en œuvre dans les classes. Cet outil destiné au secondaire peut être une bonne ressource pour les enseignants du primaire qui y trouveront de nombreuses balises.
L’ouvrage “EDD et climat”[4] rassemble des activités autour de la problématique du changement climatique pour les élèves du primaire (cycle 3, France).
Le dossier “L’éducation au développement durable : comment faire ? ” des Cahiers pédagogiques (2010)[5] se penche sur cette facette de l’éducation et interroge les pratiques de classe. Différentes contributions permettent d’éclairer la question.
Dans un bref article, Sabine Daro (2014) critique la transmission des écogestes en guise d’éducation citoyenne responsable en matière d’environnement.
Dans un autre article bref, Lucie Sauvé (2016) partage sa vision de l’écocitoyenneté. Si l’article est sans lien direct avec l’enseignement, il fournit suffisamment de repères pour penser l’ « engagement » parfois souhaité auprès des élèves. C’est dans la même optique, pour une éducation au développement durable, que le texte de Anne Versailles (2009) peut se révéler utile.
Une page de l’IFÉ est consacrée à recenser des ressources scientifiques sur le changement climatique et l’effet de serre.
Écrits scientifiques
La recherche exploratoire de Fortin-Debart et Girault (2007), menée auprès d’enseignants de l’école primaire, met en évidence les difficultés de ces derniers à mettre en place des projets éducatifs. Les approches convoquées s’inscrivent dans une approche coopérative de l’éducation à l’environnement pour un développement durable (EEDD).
Le numéro 46 de la revue Aster sous la direction de Girault et Sauvé (2008) rassemble des contributions de divers auteurs sur le sujet de l’éducation à l’environnement ou au développement durable comme par exemple :
- L’introduction de Girault et Sauvé propose un rappel historique des étapes de l’évolution de l’éducation à l’environnement en France et amène une réflexion sur le croisement de l’enseignement de sciences avec l’éducation relative à l’environnement et l’éducation pour le développement durable ;
- Dans le cadre de l’enseignement de questions socialement vives participant à l’éducation citoyenne, l’article d’Albe se penche sur la façon dont les questions relatives développement durable (plus particulièrement liées au changement climatique) sont traitées en classe et ses implications didactiques ;
- L’article de Soichot analyse six expositions sur le changement climatique en vue de dégager deux visées d’éducation la citoyenneté : pour l’action et pour la réflexion ;
- La recherche exploratoire d’Urgelli analyse les pratiques et représentations d’enseignants de lycée concernant une question interdisciplinaire, celle des risques climatiques ;
- L’article de Lange vise à établir les représentations qu’ont les enseignants du développement durable et de l’éducation en lien avec cette problématique ;
- La contribution de Pomares Brandt Aravecchia Bally Buisson-Fenet Conio Francois Mairone (2008) fait le point sur l’impact d’un atelier de formation proposé à des stagiaires enseignants et les motivations de ceux-ci dans leurs pratiques d’enseignement.
La thèse de Voisin (2017) touche à l’enseignement à la biodiversité. Elle vise à mieux comprendre les difficultés et obstacles dans les pratiques des enseignants de l’école primaire et à formuler des pistes pour accompagner les enseignants. L’article de Lhoste et Voisin (2013) est un bon complément.
La thèse de Barroca-Paccard (2018) réalise un travail d’épistémologie de cette notion de biodiversité et d’analyse curriculaire. Un article du même auteur en partenariat avec Orange Ravachol et Gouyon de la même année amène à considérer les conceptions de la biodiversité et les limites de celles-ci :
Figure : structuration du concept de biodiversité (tiré de Barroca, Orange Ravachol et Gouyon, 2018)
Le numéro 22 de formation et pratiques d’enseignement en question coordonné par Roy, Pache et Gremaud (2017) “la problématisation et les démarches d’investigation scientifique dans le contexte d’une éducation en vue d’un développement durable” propose divers articles intéressants, notamment ceux des auteurs suivants :
- Orange et Orange Ravachol questionne les conditions pour qu’une éducation relative au développement durable et à l’environnement touchant au cas de l’évolution climatique puisse aussi constituer une formation scientifique grâce à un travail de problématisation;
- Albe fait le point sur les nouvelles approches d’éducation au développement durable, sur les changements dans les disciplines en lien avec ces approches ainsi que sur les relations entre les disciplines scientifiques et les “Éducation à…” ;
L’article d’Orange-Ravachol (2014) propose de questionner dans un premier temps l’introduction des “Éducations à …”. Dans un deuxième temps, l’auteure présente deux études de cas à l’école primaire et maternelle à propos de l’éducation au développement durable, en particulier ici le problème des déchets, et présente en quoi ces projets peuvent conduire à une dédiscplinarité.
Dans son article, Lange (2014) examine les tensions qui naissent de l’éducation au développement durable notamment en termes d’approches.
L’article de Franc (2014) questionne l’intérêt du développement de l’identité affective de l’apprenant dans le cadre de l’éducation à la biodiversité. Son hypothèse est que cette dimension affective jouerait un rôle important dans les apprentissages et contribuerait à développer à la fois un regard critique et des comportements responsables. La tridimensionnalité des apprentissages (savoirs, maturité affective, comportements) est étudiée ici dans le cadre de la biodiversité des arthropodes avec des élèves de 8 à 12 ans (CE2/CM1/CM2, France).
La thèse de Marchal-Gaillard (2021) questionne l’entrée des jeunes élèves dans la culture scientifique au départ des pratiques de compostage domestique des déchets. Les conceptions de ces élèves âgés de 5 ans ont été relevées et la construction des savoirs liés à cette thématique a été investiguée.
Un article original de Gremaud, Letouzey-Pasquier, Roy et Mauron (2022) porte sur l’objet “chocolat” comme objet d’étude en classe pour former des élèves critiques et réflexifs
Dans l’ouvrage “Le sens du problème. Problématiser à l’école ?” de Michel Fabre (2016), l’auteur présente une vision stimulante et des repères clairs pour une véritable éducation au développement durable. De tels repères sont également présentés dans l’article de Fleury et Fabre (2007).
Pistes de réflexion pour les TFE et mémoires
Explorer le développement durable à l’école, c’est par exemple :
- s’interroger sur la façon d’introduire les concepts de base du développement durable selon les niveaux d’enseignement ;
- questionner le rôle des débats en classe sur la compréhension des enjeux du développement durable ;
- questionner les enjeux du développement durable et la façon dont les élèves les perçoivent ;
- interroger les activités pratiques vécues à l’école et pouvant avoir un impact sur le compréhension de ce concept (jardinage, tri, etc) ;
- se pencher sur le rôle du cours de sciences vis-à-vis de cette éducation au développement durable ;
- etc.
[1] Fabre, M. (2016). Le sens du problème. Problématiser à l’école ?. De Boeck Éducation.
[2] Guilleaume, C. (1998). Eveil à la nature et à l’environnement. Guide pédagogique pour une éducation relative à l’environnement. De Boeck.
[3] Jalajel, J., Jean-Michel, L., Noce, D. et Bonhomme, C. (2012). Intégrer le développement durable dans un projet d’école… dès aujourd’hui. Les cahiers du développement durable.
[4] Baldi, E. (dir.) (2015). EDD et climat. 30 activités au cycle 3. Canopé Editions.
[5] Bischoff O. (dir.) (2010). L’éducation au développement durable [Dossier]. Cahiers pédagogiques, 478, 9-55.